Razzia sur la Corse
Depuis dix ans, la folie spéculative s’est emparée de la Corse. Jusqu’à présent, l’île était pourtant restée sauvage et préservée, sur ses 1400 km de côtes seulement 15% sont urbanisées. Le reste est l’objet d’intenses convoitises. Rendre un terrain constructible en bord de mer, c’est transformer du maquis en or.
Pourquoi certains réussissent-ils à construire dans des lieux sauvegardés ?
Les bombes nationalistes ont-elles protégé le littoral ?
Existe-t-il un lien entre la spéculation immobilière et la violence ?
Pour mener cette enquête sur le littoral corse, de Calvi à Bonifacio, en passant par Cargese et Bastia, Hélène Constanty a dû convaincre des témoins, des militants écologistes, de l’emmener sur des sites sensibles, où l’on n’est jamais à l’abri d’une altercation. Elle a interpellé des élus qui accordent des permis de construire dans des sites pourtant protégés et les spéculateurs qui font leur miel de ces passe-droits. A Porto-Vecchio, quinze villas de luxe, vendues un million d’euro pièce, ont été construites à même le sable de l’une des plus belles baies de Corse, sur un terrain qui appartenait à la famille d’un avocat assassiné en 2012.
A Bonifacio, grands patrons et vedettes du cinéma cherchent à faire construire dans des sites encore vierges, grâce à des appuis au plus haut niveau de l’Etat. Une vidéo montre comment Nicolas Sarkozy a encouragé ces pratiques, lorsqu’il était au pouvoir. A Calvi, trois villas en construction ont été plastiquées l’hiver dernier. Le FLNC a revendiqué l’attentat au nom de la lutte contre la spéculation immobilière. Mais cette revendication est-elle sincère ?
A Cargese, un ancien clandestin explique qu’aujourd’hui, le FLNC n’est qu’un groupe armé comme il en existe d’autres en Corse. Entre certains de ses compagnons d’armes et les voyous, la frontière a disparu. L’une des spécialités des criminels corses, c’est le racket. Souvent pratiqué au nom du FLNC pour impressionner les victimes. Dans le Cap Corse, une famille a eu le courage de dénoncer l’extorsion de fonds dont elle était la cible, suite au plasticage de sa résidence secondaire. Le racketteur a été condamné à 5 ans de prison. A Bastia, le procureur général dévoile avec franchise pourquoi il est si difficile, en Corse, d’interpeller les criminels et de les traduire devant la justice.
Une enquête, fruit de plusieurs années d’investigation, par l’auteur du livre Razzia sur la Corse (Fayard, 2012).