Enfumés…, comment le lobby pétrolier américain nous a fait perdre 10 ans
A l’occasion du sommet de l’ONU sur le climat, Premières Lignes présente « Enfumés… », une enquête documentaire de Paul Moreira sur le lobby pétrolier américain et l’action des négationnistes climatiques. Le journaliste revient sur cette tempête politique montrant comment les industriels du pétrole, du charbon et de l’automobile ont placé leurs agents d’influence au cœur même de l’administration américaine. Pour rappel, les États-Unis émettent à eux seuls 30 à 35% du total des gaz à effet de serre d’origine humaine. C’est la première puissance économique dont le développement repose principalement sur l’émission de gaz carbonique.??Kyoto, décembre 1997. Pour la première fois 160 nations envisagent de réduire leurs émissions de CO2. Parmi elles, les Etats Unis d’Amérique sans lesquels aucune politique mondiale n’est possible.?Le vice-président Al Gore prononce une phrase qui sonne comme une déclaration de guerre : « Dans mon pays, nous nous souvenons des industriels du tabac qui nous expliquaient que fumer n’était pas mauvais pour la santé. A ceux qui vont chercher à faire obstruction à notre démarche nous disons : nous ne vous laisserons pas mettre des intérêts privés étroits au dessus de ceux de toute l’espèce humaine…»
Certaines industries vont se battre contre les décisions prises à Kyoto car pour elles, réduire les émissions de CO? signifie réduire la consommation et donc leurs chiffres d’affaires.
Un lobby aussi implacable que discret va tout faire pour freiner ce processus. Les lobbyistes vont infiltrer l’appareil d’état, séduire, menacer les politiques, modifier les lois. Ils vont financer une extraordinaire machine de guerre visant à nier l’urgence climatique.
2001 : George W. Bush est élu.
L’enquête montre comment les industriels du pétrole, du charbon et de l’automobile vont placer leurs agents d’influence au cœur même de son administration.
L’un de ces lobbyistes, Philip Cooney, va devenir l’interface entre la communauté scientifique du climat et la présidence des Etats-Unis.
C’était sans compter sur Rick Piltz, un modeste fonctionnaire chargé d’éditer les travaux des scientifiques sur le climat. Piltz va être témoin des pressions exercées par Philip Cooney sur la recherche.
Il va découvrir que les rapports des scientifiques sont massivement modifiés, amendés, tronqués par Cooney. En y injectant le doute, il va en altérer le sens … Là où les scientifiques avaient mentionné des certitudes, il glisse des « peut-être»… Rick Piltz décide de quitter son travail avec les documents qui établissent l’infiltration du lobby pétrolier. Il donne l’alerte, devient un « whistle blower ». L’information fait la UNE du New York Times.
En 2007, les parlementaires démocrates demandent une commission d’enquête. Ils veulent entendre Philip Cooney et lui faire avouer qu’il n’était pas un simple fonctionnaire au service du bien public mais un agent du lobby pétrolier.
Paul Moreira a obtenu l’autorisation de filmer les auditions devant le Congrès. Dans une dramaturgie évoquant un moment de cinéma, l’agent d’influence est passé sur le grill. Les auditions vont révéler les méthodes très particulières du gouvernement Bush et ses liens organiques avec l’industrie pétrolière. Ainsi, un document destiné à rester secret est produit : c’est un plan d’action élaboré par le lobby pétrolier, une feuille de route pour manipuler l’opinion publique et retarder les décisions. Un climat d’intimidation qui touchait non seule ment l’administration mais aussi les institutions comme la NASA.
Il a travaillé pendant 15 ans pour l’irole américain et son infiltration au cœur de la Maison Blanche, en tant que charnstitut du pétgé du climat au Conseil de la Qualité Environnementale, aurait dû rester secrète.
A cause des manœuvres des lobbies industriels et des blocages du gouvernement Bush, un temps précieux a été perdu. Les spécialistes disent une dizaine d’années. Après l’élection de Barack Obama, la position des climatologues et des écologistes va être entendue. L’objectif de la nouvelle administration américaine, bien disposée à lutter contre le réchauffement climatique est le suivant : ramener les émissions de gaz à effet de serre des Etats-Unis à leur niveau de 1990 d’ici 2020.